Il y a une cinémathèque à Jérusalem… c’est chouette, je retrouve le plaisir du ciné…
L’autre soir j’allais donc à la cinémathèque, voir des courts métrages israéliens… Il faisait doux, le soleil se couchait sur les collines de Jérusalem. La cinémathèque est elle même sur une colline, avec une très jolie vue donc… Je me suis arrêtée 5 min, prendre de regarder.
Le paysage est très beau autour de Jérusalem, peut être quelque chose d’une Terre Promise, oui. Les collines couvertes d’oliviers, les petites blanches…
Et puis soudain je L’ai vu. Au milieu de la « carte postale ». Un mur. Le mur. 10 m de haut, et des centaines de mètres de long. Comme une balafre de béton hideuse sur la colline.
Et il y a cette colère sourde qui monte en moi… Des « pourquoi ? »
après seulement quelque temps en Israël j’ai bien sûr quelques fragments de réponses… La paranoïa israélienne, leur vision étonnement faussée du conflit, leur peur constamment formulée en termes de menaces existentielles, les discours sur les terroristes, les rockets….
Mais moi, face au mur, je pense au libre de Badiou (que mon papa m’a prêté), dans lequel il répète qu’il n’y a qu’un seul monde. Qu’il faut s’accrocher à ce principe, encore et toujours, ne pas l’oublier, surtout dans notre monde de murs… C’est tellement rassurant un mur…
Mais un mur ça donne toujours envie d’aller voir ce qu’il y a de l’autre côté.. c’est l’effet que ça me fait en tout cas. Surtout celui-là. Pour aller au-delà des chimères ressassés par les Israéliens ou pour les médias… Voir comment les gens vivent derrière ce mur.
Ce mur est étonnement facile à franchir, au moins pour les citoyens 1ère classe comme vous et moi… Alors vendredi j’ai pris le bus. Pas le bus pour les juifs, le bus pour les Arabes. Le bus pour les Arabes, il passe aussi à Jérusalem, d’ailleurs il s’arrêtent au même arrêt de bus que les bus pour les juifs. La seule différence c’est que dedans il n’y a que des Arabes. Parce que les Arabes n’ont pas vraiment envie de prendre les bus des juifs, qui ne s’arrêtent pas forcément lorsqu’il les voit à l’arrêt de bus. Et puis les juifs n’ont sans doute pas très envie d’avoir des Arabes dans leur bus, parce que c’est bien connu tous les arabes sont des terroristes parce qu’ils n’aiment pas les juifs. Tous ça c’est un peu grossier comme arguments, mais je n’invente rien. Ça met même un peu mal à l’aise tellement c’est simple, et tellement ça pourrait avoir un arrière-goût d’apartheid (même je déteste les comparaisons anachroniques…)
Bref, je prends le bus (mais comme quoi prendre le bus peut être très chargé politiquement). Après seulement 5 min de bus le mur est là, tout près, encore plus laid que la dernière fois. Le bus longe le mur un petit moment. Puis arrive un check point.
C’est drôle parce que les check point dans les films ça a toujours l’air d’être au milieu de nul part, et très sauvage, et très dangereux. En fait le check point ça ressemble à un péage d’autoroute. Sauf qu’il ne faut pas tendre la monnaie au monsieur, mais son passeport au soldat.
Après 5 min supplémentaires de voyage (nous sommes donc à 10 min seulement de Jérusalem !), on arrive à Bethlehem…
Je suis l’ami avec qui je voyage et qui est déjà venu à Bethlehem. On marche pendant quelque temps, puis nous arrivons dans la vieille ville. Toutes les rues et les maisons sont impeccablement rénovées. Comme en attente des touristes. Mais il n’y a pas de touristes. Il n’y en a plus depuis la seconde Intifada. Quelques uns seulement, quelques chrétiens en pèlerinage, qui viennent à bord de cars bondés, restent quelques heures, visitent les églises, achètent quelques souvenirs, puis repartent. Alors dans la ville la moitié des boutiques sont fermées, et on croise pas mal de gens, qui attendent que le temps passe, qui attendent que quelque chose se passe… On arrive dans une petite boutique de souvenir pour boire un café. Ici, les gens attendent. Il y a une petite vieille, et un homme d’une trentaine d’année. La discussion s’engage, et prend vite une tournure politique. De quoi parler de toute façon, quand il ne se passe rien, dans un pays où tout est nécessairement politique ?
Mon ami fume des clopes dégueulasses… Les moins chers d’Israël… Celles qui sont distribuées dans les prisons et à l’armée. Il en offre une à notre hôte, qui évoquent les années de prison après la première et le seconde Intifada…
Puis on part se promener… On marche pendant quelque temps, et puis soudain, au bout de la rue, le mur… Une immense porte en métal, un mirador.. On marche le long du mur pendant un petit bout de temps. Sur le mur de graffitis, certains célèbres, et immenses, d’autres anonymes, dans toutes les langues. Parfois stupides, parfois sans intérêt, mais souvent émouvants.
Ce qui est étonnant en fait c’est que ce mur n’est pas « efficace »… il n’est pas réellement construit en continu. Et surtout il n’est qu’un petit bout du dispositif de « sécurité » mise en place par Israël : check points à l’entrée des territoires palestiniens, mais aussi sur toutes les routes du territoire, contrôle d’identité, barrages, etc.
Ce mur a surtout une charge symbolique. D’abord parce qu’il dégage une sacrée violence symbolique à l’égard des palestiniens. Mais aussi ironiquement parce qu’il rend ces derniers encore plus effrayant aux yeux Israéliens (quelque chose comme : « s’il y a besoin d’un aussi grand mur, c’est qu’ils doivent vraiment être dangereux). Et enfin parce que d’une certaine façon, il fait apparaître l’idée d’une frontière dans les esprits, ce qui n’est pas anodin, puisque ça signifie l’existence d’un état…
Le lendemain nous sommes allé à Ramallah. Ramallah est très vivante, contrairement à Bethlehem, car elle abrite beaucoup de Palestiniens en exil.
Ce qui est étonnant c’est que bien qu’à 10 min de Jérusalem également, Ramallah fait vraiment partie d’une autre culture. Alors qu’Israël est une sorte d’enclave occidentale, presque américaine au sein du Moyen Orient, les villes palestiniennes reflètent beaucoup plus l’image que je pouvais avoir des pays « arabes ». Les vieux Palestiniens buvant du thé à la menthe, jouant au carte et humant la shisha dans les coffee shops, et un peu surpris de voir une fille ici… Les touristes sont rares ici aussi….
Un homme m’interpelle : « Are you american ? » Je lui réponds que je viens de France. Il e demande si j’ai vu de la violence ici.. Je réponds non, et c’est vrai... il y a des soldats ici, un peu partout mais pas plus qu’en Israël après tout. Et je n’y sens pas moins en sécurité. L’homme s’exclame, « Vous voyez, la violence, c’est Israël... »
Le lendemain, nous partons pour Jéricho… Le taxi collectif est une énorme Mercedes, 3 rangées de banquettes… Jéricho est à une heure de route à peine, mais il nous faudra traverser trois check points pour l’atteindre. L’attente sous le soleil, la file de voiture. Personne ne s’énerve. La routine, juste la routine.
La voiture roule au milieu du désert… Des immenses dunes de sables et de pierre. On aperçoit les bédouins, qui ont échangé leurs tentes contre des baraques en tôle…
mercredi 18 juin 2008
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2 commentaires:
que capa mi amiga!!!
euh...
ma doudou, ça veut dire quoi "capa"...?
aie, aie, ça va être dur la communication l'année prochaine...
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